La malédiction de l’économie du créateur

Le journaliste Taylor Lorenz n’est pas la première à déclarer que les médias traditionnels sont une industrie morte en sursis. Mais peu de gens le disent avec la conviction qu’elle le fait – et une affirmation encore plus vigoureuse qu’ils connaissent son successeur. Selon elle, l’avenir des médias réside dans les influenceurs sociaux et l’économie des créateurs. Voyons comment la scribe sans pareil des influenceurs décrit cette révolution – son terme – dans laquelle une foule en ligne assiège la Bastille du tech / média avec des blogs, des TikToks, des DigiTours et des placements de produits. « Cela a radicalement bouleversé la manière dont nous avons compris et interagi avec notre monde. Il a démoli les barrières traditionnelles et a donné le pouvoir à des millions de personnes précédemment marginalisées. Il a créé de vastes nouveaux secteurs de notre économie tout en dévastant les institutions héritées. Il est souvent rejeté par les traditionalistes comme une mode vide alors qu’il s’agit en fait du plus grand et du plus disruptif changement dans le capitalisme moderne. « En fait? Plus que le capital-risque, la montée des plateformes technologiques sur lesquelles s’appuient les influenceurs, ou les décisions de la Cour suprême des États-Unis donnant aux entreprises des droits individuels tout en affaiblissant les droits que les individus réels ont de tenir les entreprises responsables? C’est une immense pile de choses à justifier, et Lorenz ne s’y essaie même pas dans son nouveau livre, Extremely Online. Son long-attendu ouvrage sur les influenceurs et les créateurs en ligne – qui ont vraiment fait une différence, bien que la partie «permettant à des millions de personnes» soit sujette à débat – est un livre d’affaires surprenamment conventionnel. Elle l’appelle justement «une histoire sociale des médias sociaux». C’est une approche logique, issue de ses excellents reportages pour The Atlantic, The New York Times et son employeur actuel de médias traditionnels, The Washington Post. Lorenz a pratiquement inventé le beat des influenceurs, devançant constamment ses concurrents en chroniquant les innovateurs et les aspirants du mouvement. Comme on s’y attendait, des personnages tels que Julia Allison, Jake Paul, Lonelygirl15, MrBeast et PewDiePie apparaissent dans Extremely Online. Lorenz décrit avec expertise les subtilités de la construction d’une personnalité sur les réseaux sociaux et, finalement, d’une entreprise autour d’elle: créer une identité authentique et focalisée; construire un public grâce à un rythme régulier, si ce n’est épuisant, de messages intelligents; s’associer à d’autres célébrités du monde Internet; attirer l’attention avec un contenu choquant ou trop personnel. Et bien sûr, les fêtes aident aussi. Si Lorenz s’abstient d’endosser ouvertement le phénomène, il est clair qu’elle est en phase avec la scène. Surtout quand il s’agit de rendre les médias traditionnels dépassés. Ses observations sur la manière dont une génération prend ces créateurs au sérieux plutôt que les chevaux de bataille journalistiques sont accompagnées de pics post-touchdown dignes de pénalités de provocation. (Sa haine pour les médias élitistes et « misogyne » est constamment évoquée dans le livre.)

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