Jake Sullivan se tenait au milieu de son bureau, qui occupe un coin aéré et ensoleillé de l’aile ouest, semblant ne pas tout à fait savoir quoi faire de ses mains. Il me faisait faire rapidement le tour de l’espace pendant trois minutes, même si la visite du bureau est, peut-être, le cliché le plus éculé du portrait de magazine—et, on m’avait prévenu, Sullivan n’est pas fan des portraits de magazine. En tout cas, pas ceux qui le concernent. L’assistant à la sécurité nationale de la Maison Blanche est une personne très sérieuse et, selon la plupart des comptes rendus, l’est toujours—un gamin du Minnesota qui avait mémorisé les capitales du monde avant l’âge de 14 ans et, à 35 ans, avait voyagé dans 112 de ces pays en tant que conseiller proche de la secrétaire d’État de l’époque, Hillary Clinton. Ancien boursier Rhodes et débatteur de classe mondiale, il écarte habilement les questions qu’il n’aime pas en remettant en question leur prémisse et parle en paragraphes bien travaillés, tout comme son ancien patron, le président Barack Obama. Un responsable de la Maison Blanche avec qui j’ai parlé a décrit Sullivan comme ayant un « esprit implacable ». La pompe des portraits de magazine—la partie où les journalistes voient trop de choses dans ce que le sujet boit ou porte, ce qui, dans le cas de Sullivan, est presque toujours un costume noir légèrement surdimensionné avec une rotation limitée de cravates unies et larges—peut sembler un peu léger pour quelqu’un qui a si soigneusement cultivé une réputation de profondeur et de substance. Alors qu’il me faisait faire le tour de la pièce cet après-midi de mai, se prêtant de bonne grâce à une sorte de démonstration éclair, même moi j’ai un peu grimacé. Le lendemain, il se rendait en Arabie saoudite pour discuter d’une voie vers la paix au Moyen-Orient avec le prince héritier, mais avais-je vu la photo de la vieille remise derrière la maison où il a grandi ? En défense de cette visite particulière du bureau, je n’étais pas là pour des détails mais pour découvrir un objet spécifique dont j’avais entendu parler avant de rencontrer Sullivan. Niché sur une étagère d’angle, là, il était: un petit morceau de tissu blanc brodé de trois flèches rouges au centre, encadré dans un simple cadre carré. C’était un cadeau que Sullivan avait fait à ses homologues japonais et néerlandais en préparation d’une réunion secrète de grande importance à Washington en janvier dernier. Les flèches étaient un clin d’œil à une vieille parabole japonaise, dans laquelle un père enseigne une leçon à ses trois fils en leur remettant chacun une flèche et en leur demandant de la casser. Une par une, les flèches se cassent. Ensuite, il attache trois nouvelles flèches ensemble et leur dit de réessayer. Liées ensemble, les flèches tiennent bon. La leçon de l’histoire est que la force vient de l’unité. Sullivan faisait confiance à ses invités pour saisir le message alors qu’ils se rencontraient pour orchestrer leur propre démonstration silencieuse de solidarité : un plan pour garder les semi-conducteurs les plus avancés au monde et les machines qui les fabriquent hors de portée de la Chine.
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