‘Ça a commencé comme une farce de jeu en ligne. Puis ça a tourné au drame.’

La réunion typique du conseil municipal de Wichita est une affaire ennuyeuse, dominée par des bureaucrates qui s’expriment sans arrêt sur les réparations de rue, les codes de zonage et les obligations générales de la ville. Mais même avant que la réunion du 17 avril 2018 ne commence, l’atmosphère était électrique. Alors que les bureaux lambrissés du conseil se remplissaient ce mardi matin, une douzaine de spectateurs ont pris soin de s’installer aux premiers rangs. Un groupe de femmes portait des T-shirts noirs assortis avec l’inscription « Arrêtez l’agent Justin Rapp de la police de Wichita ». Lorsque le porte-parole du département de police est monté sur l’estrade pour faire la prière d’ouverture, plusieurs personnes du groupe ont refusé de se lever. Le maire Jeff Longwell, qui supervise les réunions hebdomadaires, semblait redouter le drame dont il savait qu’il allait se produire. Après avoir lu une proclamation pour le Jour de l’Arbre et avoir plaisanté sur son manque de compétences en jardinage, il s’est enfoncé dans son fauteuil en cuir haut dossier et a demandé avec lassitude à la secrétaire d’appeler le point suivant à l’ordre du jour. La secrétaire a annoncé le nom d’une résidente de Wichita qui avait demandé à s’adresser au conseil, ainsi que son sujet choisi : « Lisa Finch. Mort d’Andrew Finch. » Une femme dans le public s’est levée et a marché prudemment dans l’allée de droite. Elle avait de beaux cheveux noirs et des lunettes de vue maternelles, et portait un survêtement et un sweat à capuche de différentes nuances de gris. Une fois qu’elle a ajusté le microphone flexible du pupitre pour s’adapter à sa petite taille modeste, elle a commencé à parler avec un accent plat, mais résolu, d’une fierté de Kansane. « La mort de mon fils a changé chaque fibre de mon être », a déclaré Lisa Finch, lisant le discours qu’elle avait passé des semaines à écrire à la main sur du papier quadrillé. « Je suis stupéfaite par la transformation que j’ai subie. J’ai une idée différente de moi-même. J’ai été essentiellement forcée de tout changer. Je ne reconnais plus la personne que j’étais auparavant. Cette personne est maintenant un étranger d’il y a longtemps. » Sa réflexion sincère a rapidement débouché sur une critique cinglante de la police de Wichita, qu’elle rend en grande partie responsable de ce qui est arrivé à son fils. La mort de ce dernier en décembre dernier, dans des circonstances bizarres qui ont fait les gros titres dans le monde entier, a transformé Finch en militante pour que les policiers soient tenus responsables de leurs erreurs mortelles. Sa campagne opiniâtre pour la justice a secoué sa ville, un endroit où la police a bien plus l’habitude d’être admirée que scrutée.