« Elle est le nouveau visage de l’activisme pour le climat – et elle porte un pic »

L’atmosphère est plus festive que scène de crime. Il y a un accordéoniste, et deux hommes en bonnets jouent des tambours. C’est une journée de printemps claire dans les terres agricoles de l’ouest de la France. Mais les gens rassemblés dans ce champ sont techniquement en train de faire du vandalisme, et il y a des signes qu’ils s’attendent à des ennuis. Quelqu’un a un masque à gaz autour du cou. Il y a un contingent vêtu de cagoules. D’autres dissimulent leurs visages avec des lunettes noires ou des masques, et un groupe tient une grande toile pour occulter la vue des drones de police. Au centre du tourbillon se tient Léna Lazare, tenant une pioche. Les cheveux bruns longs de la jeune femme de 24 ans sont détachés ; son visage découvert. C’est important, dit-elle. Cela ajoute un sentiment de légitimité à ce qu’elle s’apprête à faire. Elle enfonce la pioche dans le sol tandis que la foule autour d’elle regarde. Encore et encore, elle frappe la terre dure et sèche. Lorsqu’elle ne peut plus creuser, une autre personne émerge de la cohue pour prendre le relais. Plusieurs mètres plus bas, ils trouvent ce qu’ils cherchaient : des tuyaux. Sous le champ se trouve un réseau conçu pour transporter l’eau vers un nouveau « méga-bassin » – un réservoir géant en construction près du village d’Épannes. Le groupe est là pour arracher l’un de ces tuyaux du sol. Les manifestants font face aux forces de l’ordre anti-émeute en décembre 2023. Dans d’autres parties du monde, les écologistes ciblent les géants du pétrole, les aéroports et les banques pour perturber le fonctionnement des entreprises qu’ils estiment être à l’origine du réchauffement planétaire. En France, les méga-bassins sont devenus un symbole de la manière dont le gouvernement s’adapte au changement climatique d’une manière précisément incorrecte. En réponse aux sécheresses de plus en plus fréquentes, les autorités françaises ont creusé d’immenses systèmes de stockage d’eau dans les campagnes pour que les grandes exploitations agricoles puissent puiser durant les mois secs. Les détracteurs disent que ces méga-bassins – pouvant contenir jusqu’à 720 millions de litres, l’équivalent de presque 300 piscines olympiques – stockent de fait de l’eau, la réservant aux propriétaires terriens privés, laissant les rivières asséchées et les systèmes locaux d’eau souterraine épuisés. C’est pourquoi ces projets sont des cibles de sabotage, selon Lazare. Elle parle de « désarmer » les réservoirs, comme si ceux-ci, et non elle-même et ses compagnons manifestants, étaient la source de violence. Elle observe depuis la foule en ce jour clair de mars 2022 un homme en jeans et un t-shirt blanc qui s’efforce de faire sortir un morceau de tuyau du sol avec une corde. Quelqu’un produit une meuleuse d’angle. Lorsqu’une section est coupée, la foule éclate en applaudissements avant qu’un homme en bleu de travail ne brandisse le tuyau sectionné au-dessus de sa tête comme un trophée. « À ce moment-là », se souvient Lazare plus tard, « l’eau jaillit et retourna à la terre ».

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